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Génie de la construction Recherche et innovation Les infrastructures et les milieux bâtis

Planifier les chantiers autrement : la modélisation du taux d’occupation

Maquette de construction avec plans, outils de mesure et casques, illustrant le processus de développement architectural et d'ingénierie.

Sur un chantier de construction, il n’est pas rare que deux équipes aient besoin d’occuper le même espace au même moment. Ces conflits d’occupation, difficiles à anticiper, entraînent souvent des retards et des dépassements de coûts. Il faut dire que les outils les plus utilisés aujourd’hui pour planifier les projets — comme le diagramme de Gantt — ne permettent pas de visualiser facilement ce type d’enjeu. Et plus le nombre d’activités augmente, plus la complexité des interactions rend ces diagrammes difficiles à interpréter et à mettre à jour.

C’est à cette problématique que s’attaque Stéphane Morin Pépin, professeur au Département de génie de la construction de l’ÉTS. Spécialiste de la planification et de la gestion de projets de construction, il cherche à repenser la manière dont les échéanciers sont conçus et utilisés. Comment rendre la planification plus visuelle, plus réaliste et, surtout, plus utile pour les entrepreneurs sur le terrain?

Au-delà du diagramme de Gantt : une planification spatio-temporelle

L’un des axes centraux des travaux de Stéphane Morin Pépin repose sur la planification spatio-temporelle, une approche apparue dans les années 1990. Contrairement au diagramme de Gantt, qui décompose un projet en une succession d’activités, cette méthode considère l’organisation de l’espace du chantier. À partir des plans de construction, on divise le projet en secteurs, chacun correspondant à une zone d’intervention.

Les équipes de travail, les matériaux et les équipements sont ensuite répartis dans l’espace et dans le temps. Cette approche permet d’obtenir une représentation dynamique où l’on visualise simultanément les dimensions spatiales (où les activités se déroulent) et temporelles (quand elles ont lieu). On ne coordonne plus simplement des tâches, mais des équipes de travail évoluant dans des secteurs précis.

Lors de son doctorat, Stéphane Morin Pépin a poussé le concept plus loin en intégrant à cette méthode la notion d’espace occupé ou taux d’occupation. Chaque équipe de travail nécessite une superficie spécifique à ses activités, ce qui influence directement la configuration du chantier, l’enchaînement des travaux, et donc la planification des travaux. En combinant cette superficie à celles occupées par les matériaux et les équipements, il devient possible de calculer le taux d’occupation d’un secteur à un moment donné. Nommée Planification par modélisation dynamique du taux d’occupation (PMDTO), cette modélisation permet ainsi aux gestionnaires de projets de visualiser et de vérifier la compatibilité des ressources dans l’espace et, de prévenir efficacement les conflits d’occupation. Cela leur permet donc d’utiliser ce taux d’occupation pour optimiser l’échéancier des travaux. 

De la théorie à l’outil pratique pour les entrepreneurs

La recherche actuelle de Stéphane Morin Pépin vise à transformer la PMDTO en un outil opérationnel pour les gestionnaires de projets. L’idée est de définir pas à pas les procédures qui permettront à un entrepreneur de passer des plans et devis à un échéancier complet fondé sur les concepts de la PMDTO.

Cette méthode implique d’abord de définir l’ensemble des secteurs qui seront disponibles tout au long du chantier, puis de planifier leurs successions et leurs disponibilités. L’entrepreneur peut ainsi savoir à quel moment chaque secteur sera prêt à accueillir de nouvelles équipes pour ensuite calculer le taux d’occupation dynamique. Ce cadre méthodologique permettra de produire des échéanciers basés sur ce taux, d’en extraire les informations nécessaires à la planification quotidienne et d’améliorer la coordination entre les différents intervenants.

Au-delà de la planification, l’échéancier devient aussi une source d’information stratégique : une base qui permet aux gestionnaires de projets d’extraire le flux monétaire du projet, de suivre la progression des travaux et de justifier les délais contractuels en cas de litige. L’un des défis actuels consiste d’ailleurs à intégrer cette méthode avec les exigences légales et administratives fondées sur les diagrammes de Gantt traditionnels.

Un programme de recherche ancré dans les besoins du terrain

Le programme de recherche de Stéphane Morin Pépin s’articule autour de trois objectifs principaux. D’abord, il vise à déterminer les données nécessaires à la création et à la mise à jour d’un échéancier fondé sur la modélisation dynamique du taux d’occupation. Ensuite, il cherche à mieux comprendre comment cette approche peut faciliter la gestion des imprévus, en la comparant aux méthodes traditionnelles de planification. Enfin, il explore les liens entre la planification spatio-temporelle et la gestion financière afin de produire des prévisions de flux de trésorerie plus fiables.

Ces travaux s’appuient sur les technologies les plus récentes — la modélisation des données du bâtiment (BIM), la Construction 4.0 et l’intelligence artificielle — pour concevoir des interfaces interactives et des algorithmes d’aide à la décision capables de soutenir les entrepreneurs dans la gestion quotidienne de leurs chantiers.

Des retombées concrètes pour l’industrie

Les retombées attendues de cette recherche sont multiples. Sur le plan scientifique, elle contribue à l’avancement des connaissances en gestion de projets, en modélisation dynamique et en planification spatiale. Sur le plan pratique, elle offre un cadre méthodologique et des outils concrets pour réduire les risques, éviter les conflits d’occupation et améliorer la productivité sur les chantiers.

À terme, ce type de planification spatio-temporelle pourrait devenir un nouveau standard de planification dans l’industrie de la construction, en modernisant les pratiques et en renforçant la collaboration entre les entrepreneurs, les ingénieurs et les architectes.

Pour Stéphane Morin Pépin, l’objectif est clair : « Que ma recherche serve d’abord à ceux qui bâtissent, qu’elle soit utile sur le terrain, au quotidien. »