Les 7 et 8 mars 2024, le laboratoire INIT Robots de l’ÉTS, en partenariat avec des artistes du Département de danse de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et le laboratoire MIST de Polytechnique Montréal, présentait une pièce novatrice au Festival de Casteliers à Montréal. Nommée DESSAIM, mot combinant « dessein » et « essaim », cette installation mettait en vedette une variété d’essaims robotiques inspirés de la nature. Les spectateurs étaient invités à explorer cet environnement interactif, interagissant avec les groupes de robots à travers la lumière, l’ombre et le son afin de vivre l’intégration harmonieuse de la technologie et de l’art.
Quatre types d’essaims de robots
Ali Imran, candidat au doctorat, étudie les robots Doodys, manipulateurs mobiles de taille humaine dont les performances artistiques visent à susciter des sentiments positifs envers les robots. Le processus de création par itération exigeait une étroite collaboration entre les marionnettistes et les maîtres du mouvement expressif et s’est avéré une expérience d’apprentissage enrichissante pour les deux groupes.
Alexandra Mercader, postdoctorante, était responsable de la chorégraphie du bras robotique de Kinova placé sur les Doodys. Son travail acharné avec les chorégraphes et les danseurs a permis de créer des mouvements fluides à l’aide d’un logiciel sur mesure. L’élaboration minutieuse de quatre chorégraphies pour cinq robots a mis en lumière les défis artistiques et techniques de la performance robotique. Des défis comme l’autonomie énergétique ont été rapidement résolus, permettant d’améliorer le travail d’équipe et l’efficacité. Établir la synergie entre artistes et ingénieurs a pris du temps, mais le programme de résidence et une présence quotidienne ont favorisé le partage et la compréhension des besoins des artistes par rapport aux contraintes des ingénieurs et des robots.
Matthis Di Giacomo, M.Ing., a travaillé sur les drones CrazyCognis, petits drones d’intérieur de 250 g conçus sur mesure, et en particulier sur la fiabilité et l’intégration harmonieuse de la vision des marionnettistes. Dans le contexte de la recherche universitaire, où ces robots sont généralement utilisés, les défaillances peuvent être résolues par essais répétés. Mais ici, il fallait garantir la fiabilité des drones, car toute défaillance au cours d’une performance ne pouvait pas passer inaperçue (par exemple, un écrasement). Il fallait une communication efficace entre artistes et ingénieurs pour aligner les visions créatives sur les capacités techniques des robots.
Rafael Gomes Braga, MScA, a développé et déployé les « sushis », petits robots fonctionnant sous un projecteur. Sa collaboration avec Audrey Rochette, spécialiste en chorégraphie, visait à étudier et à raffiner divers comportements d’essaims. Ce travail a débouché sur des découvertes et des tests itératifs, à la fois dans des simulations et des présentations concrètes. Le comportement de l’essaim réalisé pour les sushis a ensuite été reproduit sur les deux autres plateformes.
Une performance créative et captivante
Pendant les représentations, les « sushis » sortaient d’une « grotte » imaginaire et exhibaient des interactions dynamiques avec l’environnement et le public. Ces interactions, réparties sur trois stations distinctes, ont captivé les visiteurs, en particulier les enfants, leur permettant de voir les essaims de robots sous différents angles et selon différents actes scénographiques.
La performance des Doodys commençait par l’éveil; les robots se réveillaient et commençaient à regarder curieusement autour d’eux, essayant de comprendre leur entourage. Ils se dirigeaient ensuite vers le nid. Or, ce trajet ne ressemblait pas à une navigation robotique traditionnelle. Les robots connaissaient la position des robots environnants et se déplaçaient en groupe, en harmonie, veillant à maintenir la bonne distance entre eux pour ne pas être déconnectés de la meute. On aurait dit une communauté d’êtres migrant d’un endroit à un autre, comme les essaims dans la nature.
Les drones CrazyCognis agissaient un peu comme les protecteurs du nid, se méfiant des artistes qui s’approchaient et tournaient autour d’eux comme un commando
Rafael a pu noter que la réserve initiale de l’auditoire se transformait en fascination au fur et à mesure de son interaction avec les robots, ces derniers se comportant parfois de manière imprévisible, les humanisant aux yeux des spectateurs. Alexandra a souligné la performance artistique spectaculaire et acclamée, constituant une révolution dans la chorégraphie d’essaims de robots. Matthis a pu observer la curiosité et l’étonnement du public qui se demandait souvent si les robots pouvaient les « voir » et s’ils pouvaient réagir aux perturbations externes.
Une fusion entre la science et l’art
Le projet DESSAIM a non seulement mis en évidence les prouesses techniques et le potentiel artistique des essaims robotiques, mais il a également souligné la portée considérable de la collaboration interdisciplinaire. Le spectacle fusionnant la robotique et la danse a permis de transformer la perception des spectateurs sur la technologie, révélant le côté plus souple et plus accessible des robots. Cette initiative a servi à rappeler avec insistance la magie qui peut se produire lorsque l’art et le génie se croisent. Elle a fourni des informations précieuses et une inspiration tant aux créateurs qu’au public. Le succès du projet établit une nouvelle norme pour les explorations futures alliant l’art et la technologie, favorisant un dialogue continu et l’innovation dans ce domaine passionnant.
- Imran, A., Varadharajan, V. S., Braga, R. G., Bouteiller, Y., Abdalwhab, A. B. M., Di-Giacomo, M., ... & St-Onge, D. (2024). From the Lab to the Theater: An Unconventional Field Robotics Journey. arXiv preprint arXiv:2404.07795.