
Ouvrir la voie à la 6G avec les térahertz
Imaginez une ville où des véhicules autonomes circulent en toute sécurité, communiquant instantanément pour éviter les collisions, tandis que des interventions chirurgicales à distance sont pratiquées dans différents continents sans aucun délai. Ces deux services, nécessitant des données à haut débit pour les voitures (eMBB) et des communications ultra-fiables à faible latence (URLLC) pour la chirurgie, doivent coexister sur le même réseau sans interférer l’un avec l’autre.
Les communications sans fil façonnent déjà notre quotidien, des appels vidéo avec la famille à l’apprentissage en ligne, en passant par les voitures connectées. Mais avec chaque nouvelle génération technologique, la demande en connexions plus rapides, plus fiables et moins énergivores augmente. Les futurs réseaux 6G devraient pouvoir prendre en charge non seulement les portables, mais aussi les voitures autonomes, la réalité virtuelle immersive, les robots industriels et les villes intelligentes.
Le défi réside dans le fait que les réseaux 5G actuels ont du mal à offrir à la fois vitesse et fiabilité, en particulier dans les environnements denses et multicellulaires comme les centres-ville de Montréal ou Toronto.
Une solution prometteuse pour répondre à cette demande consiste à aller au-delà des bandes de fréquences actuelles et à explorer le spectre térahertz (THz). Ce spectre offre une bande passante énorme et un potentiel de débits de données ultra-élevés. Or, les signaux THz présentent un défi majeur : ils sont facilement bloqués par les murs, les objets et même les personnes, et leur signal s’atténue rapidement à distance. C’est là que ma recherche entre en jeu.
Les surfaces intelligentes : des miroirs pour signaux
Imaginez être dans une pièce équipée de miroirs : la lumière peut atteindre les coins sombres en se reflétant sur les miroirs. De la même manière dans les réseaux sans fil, nous pouvons guider les signaux THz en plaçant des « miroirs » spéciaux appelés surfaces intelligentes reconfigurables (IRS). Il s’agit de panneaux minces à faible consommation d’énergie, composés de nombreux éléments minuscules qui peuvent ajuster la façon dont ils réfléchissent les signaux.
En déployant des IRS sur des bâtiments, des drones et des satellites, nous pouvons rediriger les signaux sans fil et garantir à tous et à toutes une connexion puissante, même lorsque le chemin direct est bloqué. Cette propriété est particulièrement vitale pour les applications qui nécessitent une communication ininterrompue, comme la chirurgie à distance, les usines automatisées ou les véhicules autonomes.
Mes contributions à la recherche
Au cours de mon doctorat à l’ÉTS, j’ai étudié comment rendre les réseaux THz assistés par IRS pratiques et efficaces. Mes principales contributions sont les suivantes.
- Nouveaux modèles de canaux : J’ai développé des modèles mathématiques qui permettent de mieux comprendre le comportement des signaux THz réfléchis par des IRS, en particulier lorsque le système dispose d’informations imparfaites sur l’environnement.
- Allocation intelligente des ressources : J’ai conçu des algorithmes basés sur la théorie de l’appariement. Ce concept est emprunté aux applications de rencontre qui mettent en relation des personnes compatibles, afin d’assurer l’appariement optimal entre elles, les IRS et les émetteurs. Pour les besoins plus pointus, on profite ainsi de la meilleure connexion possible.
- Services d’équilibrage : Les réseaux modernes doivent répondre à la fois aux demandes à haut débit (eMBB) et aux demandes ultra-fiables (URLLC) comme les communications d’urgence. J’ai proposé des solutions pour équilibrer ces deux demandes, maximiser la vitesse et garantir la fiabilité.
- Intégration des réseaux futurs : J’ai étendu l’étude aux réseaux hybrides combinant des IRS terrestres, des plateformes haute altitude (ballons ou drones) et des satellites en orbite terrestre basse. Cette conception multicouche offre une couverture mondiale et une résilience essentielles pour l’avenir de la 6G


Pourquoi c’est important
La portée de cette recherche va bien au-delà de la simple curiosité universitaire :
- Meilleure connectivité : Peut aider à éliminer les « angles morts » dans les zones urbaines densément peuplées ou les régions éloignées.
- Fiabilité des services essentiels : Garantit le fonctionnement ininterrompu d’applications comme les soins de santé à distance et les véhicules connectés.
- Efficacité énergétique : Les IRS consomment beaucoup moins d’énergie que les antennes classiques, ce qui rend les réseaux plus écologiques.
- Évolutivité : Les méthodes mises au point peuvent prendre en charge le nombre massif d’appareils attendus dans les réseaux 6G et l’Internet des objets (IdO).
Orientations futures
Les prochaines étapes : tester des IRS actifs capables d’amplifier les signaux, intégrer l’apprentissage automatique pour rendre les IRS autoadaptatifs et mener des simulations à grande échelle combinant des déploiements terrestres, aériens et satellitaires. Ces innovations accéléreront la transition vers un monde connecté où les réseaux 6G pourront prendre en charge tous les aspects de notre vie numérique.
Informations complémentaires
Pour plus d’informations sur nos techniques, nos évaluations et nos paramètres de simulation, veuillez consulter l’étude complète : “JPUSA in Coexistence of eMBB and URLLC Services in Multi-Cell IRS-Assisted Terahertz Networks”.