
Le professeur François Blanchard et son équipe de recherche à l’ÉTS ont mis au point une nouvelle méthode qui les rapproche d’un objectif ambitieux : mesurer l’énergie émise par un seul photon dans le domaine de fréquence des térahertz. À terme, l’équipe de recherche vise la création d’un nouveau dispositif intégré à un laser pour détecter ces photons. À l’heure actuelle, ce genre de dispositif n’existe que pour les domaines de la lumière visible ou de l’infrarouge.
Ce nouveau laser « quantique » térahertz ouvrirait la porte à plusieurs applications, telles que les communications cryptées, l’imagerie corrélée ou la spectroscopie ultra précise.
Jusqu’à présent, des chercheurs du monde entier ont mis en œuvre divers systèmes optiques capables, sous certaines conditions précises, de mesurer indirectement les photons térahertz. Toutefois, ces systèmes nécessitent un filtrage complexe en sortie pour isoler les photons d’intérêt ou un système de refroidissement cryogénique complexe. Les chercheurs de l’ÉTS sont sur le point de contourner cette contrainte grâce à une approche novatrice.
Une séparation géométrique pour une détection plus efficace
L’innovation de l’ÉTS repose sur les propriétés optiques non linéaires d’un matériau solide et les lois de la conservation de l’énergie. En dirigeant simultanément un photon térahertz et un faisceau lumineux visible ou infrarouge dans un cristal non linéaire sous des angles distincts, on obtient en sortie deux photons séparés géométriquement des autres, selon des règles mathématiques précises. Cette séparation naturelle élimine ainsi le besoin de filtrage, contrairement aux autres méthodes où les faisceaux entrants sont colinéaires.

Les chercheurs ont réussi à convertir les photons térahertz en lumière infrarouge, ce qui permet de capter l'information à l'aide d'une caméra CCD standard. Grâce à la séparation des angles, ils peuvent identifier les différentes fréquences présentes dans le signal, un peu comme si l'on décomposait une image en ses différentes couleurs, à la manière d'une transformation en ondelettes en optique (voir image suivante).

Prochaine étape : abaissement du seuil de détection
La prochaine étape consistera à augmenter la sensibilité du système afin de pouvoir mesurer l’énergie des photons détectés jusqu’au photon individuel pour chaque fréquence. Ces mesures fourniront de l’information sur les photons térahertz qui ont alimenté le système. « Ce sont les premiers pas vers la création d’un détecteur térahertz à photon unique et ce concept sera déployé pour diverses configurations et applications intéressantes dans le futur, annonce François Blanchard. Ce travail est le fruit d’une collaboration fructueuse avec l’université de Nagoya ».
À suivre…
Cette recherche a été effectuée dans le cadre d’une subvention Alliance Internationale avec l’Université de Nagoya au Japon et la Chaire de recherche du Canada en cryptage spatiotemporel de la lumière térahertz assisté par une méthode computationnelle (tier 2). Une partie de cette recherche se poursuivra grâce à la subvention Alliance Quantique avec l’Université d’Ottawa, le CNRC et Teraxion, une entreprise fabriquant des lasers. Pour plus de détails, consultez la publication suivante :
S. Mine, J. E. Nkeck, J. Lafrenière-Greig, G. Gandubert, K. Murate, and F. Blanchard, “Single-shot up-conversion terahertz spectrometer with high frequency resolution,” Optica 12(2), 239-245 (2025). https://doi.org/10.1364/OPTICA.538030