
La perte de sens au travail, découlant de l’absurdité organisationnelle, est une caractéristique majeure du système de gestion contemporain. Or, le design pourrait servir de remède, selon Guillaume Blum, professeur en design à l’ÉTS et directeur du département.
L’innovation, trait d’union entre la gestion et le design
Titulaire d’un diplôme d’ingénieur (2003, d’une maîtrise en administration des affaires de l’UQAM (2007) et d’un doctorat conjoint en administration de l’ESG UQAM (2014), Guillaume Blum s’intéresse surtout aux enjeux liés à l’innovation. En approfondissant ses recherches, il s’approche des théories et de la pratique du design : voir à travers les yeux des usagers à qui on s’adresse. Le professeur Blum évoque l’exemple d’Apple, qui, contrairement à la plupart des autres entreprises, crée ses produits en fonction d’une démarche de design auprès des utilisateurs. Dans quel contexte l’individu écoute-t-il de la musique? Est-ce dans l’autobus, à la maison ou au travail? Est-ce un moyen de se détendre, d’atténuer les bruits ambiants ou d’aider à la concentration?
Le design est méconnu. On pense à la couleur, à la forme, au matériau, mais cette discipline est multiple et englobe plusieurs champs, autant esthétiques que fonctionnels, symboliques, culturels ou organisationnels. Le principe fondamental consiste à inclure les personnes concernées dans le processus.
Sherlock Holmes sur le terrain
Une équipe d’ingénieurs d’une entreprise aéronautique ne se sentira pas nécessairement motivée à l’idée de concevoir un avion à moindre coût. Cependant, si on leur confie la tâche de concevoir un avion plus respectueux de l’environnement, ces ingénieurs trouveront généralement un sens accru à leur travail. Ils auront ainsi l’impression de contribuer au bien-être de l’ensemble de la société en mettant leur compétence au profit d’un objectif commun.
L’approche abductive du design exige un aller-retour constant entre la théorie et la pratique. « Si ça ne fonctionne pas, on retourne sur le terrain pour mieux comprendre et on apporte des modifications, à la manière de Sherlock Holmes », explique le professeur Blum. Les designers sont formés pour réfléchir sur des enjeux complexes impliquant plusieurs parties prenantes et pour trouver la voie de passage qui suscitera l’adhésion de tous les groupes impliqués.
Cette création de connaissances ouvre la porte aux innovations, et ce, dans tous les domaines.

La chaire en économie créative et mieux-être
Guillaume Blum est également cotitulaire de la Chaire de recherche en économie créative et mieux-être. L’un des objectifs de cette chaire est d’analyser les enjeux de découvrabilité du contenu, notamment en améliorant le positionnement du contenu québécois sur les plateformes numériques. Selon Guillaume, il s’agit d’une question cruciale, car les algorithmes de ces sites ne favorisent pas nécessairement la diffusion de musique d’ici, ou l’intérêt des individus ou de la société. En réfléchissant aux usages et aux intérêts des personnes, on peut trouver le moyen de lier l’identité collective à la vitalité culturelle.
L’innovation par le design à l’ÉTS
Depuis une quinzaine d’années, Guillaume Blum enseigne dans diverses universités au Québec à des étudiants et étudiantes de tous les cycles. Lorsque l’ÉTS donne son feu vert pour la création d’un département de design, sous l’impulsion du professeur Félix Faucher, Guillaume Blum se joint à l’équipe avec enthousiasme. « C’est très excitant de participer à la genèse d’un nouveau département qui modifiera un peu la dynamique de l’établissement, puisque nous recrutons des étudiants et étudiantes en sciences humaines, en multimédia, en design industriel ou en design graphique », s’exclame le professeur Blum. Bien entendu, l’ÉTS reste avant tout une école d’ingénierie, mais ce programme insuffle une touche novatrice à son profil.
Jusqu’à présent, on a relativement peu étudié les questions liées à l’innovation par le design. Qu’est-ce qui est important pour l’individu dans ce contexte particulier? Il s’agit d’améliorer la vie des gens de façon concrète en comprenant leur réalité. « En fait, le design, c’est de l’anthropologie appliquée », résume le professeur Guillaume Blum.