Transformer les déchets organiques en biodiesel
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La gestion des matières résiduelles pose de sérieux défis. Chaque année, on estime que le Canadien moyen génère entre 150 et 200 kg de déchets organiques, soit en résidus alimentaires ou en résidus verts (pelouse, feuilles, branches…). De plus, les municipalités génèrent des biosolides issus du traitement des eaux usées. De ces déchets, 52 % sont enfouis, contribuant ainsi à la formation de méthane, un gaz à effet de serre relativement puissant. La portion recyclée (31 %) est essentiellement compostée. Or le compostage comporte certains désavantages, dont la création d’odeurs, nuisant à son acceptabilité sociale. Il produit aussi des gaz à effet de serre et est difficilement rentable.
Notre équipe de recherche propose d’explorer une autre voie pour valoriser les résidus organiques : la production de biodiesel à partir de larves de mouche soldat noire.
La mouche soldat noire : un organisme étonnant
La principale caractéristique qui différencie la mouche soldat noire de ses congénères est son absence de bouche. Ce diptère ne se nourrit que sous l’état de larve : cette espèce est donc inoffensive, peu propice à se transformer en vecteur de contamination. Le procédé consiste à nourrir des larves de mouche soldat de déchets organiques afin de leur permettre d’accumuler des lipides, qui seront par la suite extraits et convertis en biodiesel. Le résidu du procédé peut ensuite être composté.
Les avantages anticipés de cette recherche sont une diminution des odeurs produites, une réduction de l’ordre de 10 fois l’empreinte écologique et une augmentation de la rentabilité économique. Toutefois, pour y arriver, plusieurs aspects du procédé se doivent d’être mieux compris et optimisés.
Concentrer la teneur en lipides des larves
La culture de larves de mouche soldat s’est destinée jusqu’à maintenant au marché de l’alimentation animale : le résultat recherché était donc la maximisation de la teneur en protéines. Pour produire du biodiesel, c’est une haute teneur en lipides qu’il faut viser. Nous nous pencherons donc sur les différents paramètres opérationnels pour élucider les mécanismes du procédé et mieux comprendre les cinétiques de croissances des larves et d’accumulation des lipides. La réduction des émissions gazeuses fera aussi partie de nos objectifs.
Optimiser l’extraction des lipides pour maximiser la production de biodiesel
Cette étape est cruciale pour produire un volume maximal de biodiesel et assurer la viabilité économique de ce modèle de recyclage. La qualité du biodiesel produite doit aussi répondre aux normes de qualité canadienne. Plusieurs techniques d’extraction n’ont pas été testées ou comparées à ce jour et les performances actuelles se doivent d’être améliorées.
Un pas de plus vers l’économie circulaire
Les recherches menées par notre équipe permettront d’étudier le potentiel de cette technologie ainsi que ses impacts environnementaux. Ceci est essentiel puisque le Canada doit mettre en place de nouvelles façons de faire s’il veut atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre (40 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2005) et de carboneutralité d’ici 2050. La réussite du recyclage de nos déchets passera sans doute par la recherche et l’optimisation de procédés innovants, peu explorés jusqu’à présent.