Mieux valoriser les débris de bois de la construction

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La logistique inverse : cette grande inconnue
La logistique vise à augmenter la performance des systèmes par une meilleure prise de décision sur les flux physiques, financiers et de l’information. Traditionnellement, ses objectifs étaient d’augmenter les profits, les revenus, la productivité, tout en diminuant les coûts, les risques et les arrêts de production. Elle s’avère maintenant incontournable pour réduire nos impacts environnementaux, en diminuant les déchets produits et les émissions de carbone. Lorsqu’elle contribue à densifier les gisements de matières résiduelles afin de favoriser leur valorisation, on parle de logistique inverse.
Valorisation du bois de construction
Les débris provenant du secteur de la construction, de la rénovation et de la démolition (CRD) représentent plus du tiers des rebuts générés au Québec, le bois constituant l’une des matières principales. Actuellement, 1,5 million de tonnes de bois résiduel sont enfouies chaque année, ce qui, en plus d’entraîner le gaspillage de matières premières, génère autour de 2,25 tonnes de gaz à effet de serre (GES). De plus, la majeure partie du bois valorisé est brûlée pour la production d’énergie, une autre source importante de GES.
Pour augmenter la quantité de résidus de bois valorisé tout en diminuant la quantité de GES produite, nous avons proposé une restructuration du réseau logistique inverse de récupération des déchets CRD.
Des enjeux de qualité et d’emplacement
D’un côté, la demande et l’offre pour les résidus de bois dépendent fortement de leur qualité. Il faut donc les trier selon leur grade si l’on espère les valoriser. Actuellement, tous les rebuts sont mélangés, ce qui accentue la contamination du bois.

Figure 1 : Variation de l’offre et de la demande selon la qualité du bois
D’un autre côté, l’emplacement et la quantité de déchets produits varient énormément dans le temps, ce qui augmente l’incertitude des données. Ces données pourront être prédites au moyen de l’apprentissage machine.

Figure 2 : Centres de tri et sites de production de CRD
Profit maximal pour un minimum de GES
Une stratégie de tri à la source a été envisagée par l’intégration de plates-formes dynamiques (centres de transbordement). Des simulations ont été effectuées à partir d’un modèle d’optimisation linéaire en nombre entier (MIP), alimenté des spécificités du réseau, comme la quantité de déchets collectés, les taux de recyclage des différents centres de tri et des points dynamiques de collecte de déchets. Les incertitudes quant à la qualité du bois et la performance des centres de tri ont aussi été prises en compte.

Figure 3 : Stratégie de tri à la source
La profitabilité de l’exploitation de la structure proposée a été évaluée en fonction de la portion de bois enfouis. Bien que le cadre réglementaire proposé par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques (MELCC) cible à 70 % la matière organique recyclée ou valorisée d’ici 2030, les simulations ont démontré que le profit maximal était atteint à 64 % de réemploi pour le cas étudié.

Figure 4 : Profitabilité selon la portion de bois enfoui
L’évaluation des émissions de GES découlant de toutes les activités liées à la structure proposée démontre clairement le bien-fondé du tri à la source. De plus, le scénario maximisant le profit (36 % d’enfouissement) mène à une production de GES inférieure de 9 % en comparaison aux GES produits dans le scénario respectant le cadre réglementaire du MELCC.

Figure 5 : Émissions de GES selon les différents scénarios
Les simulations ont démontré qu’en augmentant légèrement la portion de bois enfoui, on rend l’exploitation du système proposé plus profitable tout en diminuant la production de gaz à effet serre. Nos résultats témoignent de la pertinence de recourir aux approches de logistique inverse pour faire face à l’urgence climatique.