La genougraphie : mieux évaluer la fonction dynamique du genou
L’image d’en-tête est utilisée avec la permission de Emovi et est protégée par des droits d’auteur.
Le genou est l’une des articulations les plus complexes du corps humain. Lorsqu’un médecin est consulté pour une douleur, il fait effectuer une radiographie ou une résonance magnétique afin de vérifier l’intégrité des structures. Toutefois la douleur ressentie n’est pas toujours fonction de l’intégrité des structures. En cas d’arthrose par exemple, une légère détérioration du cartilage peut provoquer des douleurs importantes chez le patient. À l’inverse, certains patients ayant une arthrose avancée ont peu de douleur. Des chercheurs du Laboratoire de recherche en imagerie et en orthopédie de l’ÉTS (LIO) ont mis au point un outil permettant l’évaluation objective de la fonction dynamique du genou : la genougraphie.
Le genou : une articulation complexe
Le seul mouvement du genou perceptible à l’œil nu pendant la marche est la flexion-extension. Or deux autres petits mouvements de rotation, soit la rotation tibiale et l’abduction-adduction, caractérisent davantage la fonction du genou.
Pour les mesurer, on a tenté d’installer des marqueurs sur la peau à différents endroits (au niveau de la jambe, de la cheville, de la hanche…) et de filmer la position de ces marqueurs dans l’espace pendant la marche sur un tapis roulant. Or, la peau bouge beaucoup à certains endroits, ce qui faussait les mesures et les rendait très imprécises. Les chercheurs du LIO ont su contourner le problème en installant les marqueurs sur un harnais, lequel est attaché à certains endroits stratégiques, où la peau bouge très peu.
Grâce à ce harnais, les niveaux de précision obtenus en laboratoire sont suffisants pour mesures les petites rotations non visibles à l’œil nu.
.
.
Caractériser la dynamique d’un genou
La genougraphie peut se comparer à un électrocardiogramme. L’électrocardiogramme produit une courbe qui, une fois interprétée, permet de mesurer l’activité électrique du cœur. La genougraphie remplit le même genre de fonction. Le mouvement des marqueurs, de petites boules réfléchissantes, est capté par une caméra qui en enregistre la position en temps réel. La combinaison de ces données permet d’établir un système d’axes et de décomposer le mouvement 3D en une flexion, une rotation tibiale et une adduction. Ces mouvements sont traduits en courbes, lesquelles sont analysées et comparées au fonctionnement normal du genou. En effet, les chercheurs du LIO ont su extraire des points caractéristiques (minimum, maximum, pentes…) correspondant à certains facteurs de risques de progression de l’arthrose, rapportés par la littérature. L’outil est certifié par la FDA, Santé Canada et a reçu le marquage CE.
Aide au traitement et plus!
En plus de fournir une mesure objective de la fonction du genou pour mieux comprendre l’origine de la douleur ressentie par le patient, la genougraphie permet de personnaliser le traitement en informant précisément le physiothérapeute ou le kinésiologue des déficits en jeu. Ce dernier peut donc proposer des exercices ciblés pour les corriger, en renforçant certains muscles et en étirant d’autres, selon la biomécanique propre du patient. Par la suite, le même test permet de mesurer les progrès réalisés et ainsi évaluer la pertinence du traitement. À plus long terme, la genougraphie pourrait même servir à établir un ordre de priorité pour les interventions chirurgicales orthopédiques, en différenciant les cas où la chirurgie est la seule option possible des cas où un traitement non chirurgical (p. ex. physiothérapie) pourrait être tenté.
Accessibilité du test
Le test est offert pour l’instant seulement en clinique privée. La prise en charge d’une cohorte de 70 participants ayant été évalués au moyen de la genougraphie a démontré plusieurs bienfaits. De façon générale, les participants ont déclaré ressentir moins de douleur et ont réduit la prise de leurs médicaments. Certains ont abandonné la canne et même, ont choisi de retarder le traitement chirurgical. Il a aussi été noté que les personnes comprenaient mieux leur condition et étaient plus motivées à suivre les recommandations.
Depuis 2014, une autre étude, composée d’une cohorte de presque 800 patients souffrant d’arthrose, est en cours pour vérifier si les mêmes résultats sont obtenus dans le secteur public. Si l’approche entourant la genougraphie obtient le même succès qu’au privé, les chercheurs du LIO proposeront que ce test soit remboursable par la Régie de l’assurance maladie du Québec.