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L’effet d’occlusion : Quand les bouchons d’oreille deviennent agaçants

Bouchon d’oreille

Acheté sur Adobestock. Droits d’auteur.

RÉSUMÉ:

Si vous vous bouchez les oreilles avec les doigts et lisez cette phrase à haute voix, vous constaterez que votre voix semble plus grave. Ce phénomène s’appelle l’effet d’occlusion, une amplification de la perception des bruits physiologiques de basses fréquences lorsque le canal auditif est occlus. L’effet d’occlusion rend les bouchons d’oreille inconfortables et peut mener à une utilisation incorrecte ou discontinue des dispositifs de protection auditive. Plusieurs modèles de l’effet d’occlusion ont été proposés dans la littérature afin d’étudier ce phénomène. Nous présentons ici le premier modèle numérique d’une tête entière dédié à l’étude de l’effet d’occlusion. Grâce à ce modèle, nous avons pu mettre en évidence l’influence des propriétés mécaniques des matériaux des tissus biologiques, qui varient d’un individu à l’autre, sur l’effet d’occlusion. Ce faisant, nous commençons à comprendre d’où provient la variabilité interindividuelle associée à l’effet d’occlusion. Mots clés : effet d’occlusion, inconfort acoustique, bouchon d’oreille, protection auditive

L’inconfort varie d’une personne à l’autre

Les personnes surexposées aux bruits utilisent généralement des dispositifs de protection auditive (casque antibruit, bouchons d’oreille) afin de prévenir la perte auditive causée par le bruit. Or, ces protections sont parfois utilisées de manière incorrecte ou discontinue en raison de leur inconfort. L’ampleur de la gêne acoustique est partiellement liée à l’effet d’occlusion. Cet effet correspond à la perception accrue des bruits physiologiques dans le corps, comme la voix, la respiration, la mastication et les battements cardiaques, qui sont transmis dans le canal auditif. Pour entendre ces sons, vous pouvez simplement vous boucher les oreilles avec vos doigts. L’effet d’occlusion est particulièrement évident en basses fréquences lors du port de protections auditives de type bouchon d’oreille. Ce phénomène peut être quantifié de manière objective par la différence de niveaux de bruit (en décibels) mesurés au tympan entre le cas où le conduit auditif est occlus et le cas où il est ouvert (i.e., non-occlus). Dans le but de mieux comprendre l’effet d’occlusion, plusieurs modèles du phénomène ont été proposés dans la littérature. Dans cet article, nous décrivons la réalisation du premier modèle numérique d’une tête humaine entière dédié à la simulation de l’effet d’occlusion objectif des bouchons d’oreille et tenant compte des voies complexes de transmission du son par conduction osseuse. Les résultats de simulations montrent à quel point les propriétés des matériaux des tissus biologiques humains influencent l’effet d’occlusion, l’une des raisons qui explique la variabilité interindividuelle de l’effet d’occlusion observée dans les expériences sur les participants humains.

Modélisation de l’effet d’occlusion

Afin de simuler l’effet d’occlusion objectif, nous avons conçu un modèle numérique de tête humaine avec son conduit auditif ouvert ou occlus par un bouchon d’oreille en mousse. Dans un premier temps, nous avons scanné la tête d’un participant adulte par imagerie médicale (voir figure 1(a)). À partir des images médicales (voir figure 1(b)), nous avons identifié différentes structures anatomiques de la tête. Dans un deuxième temps, à l’aide des logiciels de traitement d’images Materialise Mimics et 3-Matics (Louvain, Belgique), nous avons segmenté le cerveau, le liquide céphalo-rachidien, le crâne, les tissus mous (peau, graisses, muscles, etc.) et les cartilages auriculaires (voir figure 1(c)) et les avons reconstruits en 3D.

Modèle de tête créé par IRM

Figure 1 Acquisition de la géométrie des structures anatomiques de la tête à partir d’images médicales. IRM : imagerie par résonance magnétique

En troisième lieu, nous avons importé les modèles géométriques des structures anatomiques dans un logiciel d’analyse, de résolution et de simulation par éléments finis (COMSOL Multiphysics v.5.5, COMSOL AB, Suède) afin de créer le modèle numérique de transmission du son par conduction osseuse dans la tête humaine (voir figure 2(a)) et, finalement, de simuler l’effet d’occlusion objectif. Dans le cas de l’oreille occluse, nous avons modélisé le conduit auditif (voir figure 2(b)) avec un bouchon d’oreille à géométrie simplifiée (figure 2(c)). Les tissus biologiques et le bouchon d’oreille ont été définis d’après les propriétés des matériaux recensées dans la littérature scientifique. Différents ensembles de propriétés ont été proposés pour les tissus biologiques selon les données de la littérature et sont utilisés ici afin d’évaluer leur influence sur l’effet d’occlusion. La tête était « immergée » dans l’air. Pour simuler une excitation communiquée par conduction osseuse, généralement transmise par transducteur (sorte de vibrateur à usage clinique), nous avons appliqué une force dynamique normale par unité de surface sur une zone des tissus mous recouvrant la mastoïde et correspondant à l’emplacement du transducteur. Nous avons effectué les calculs dans une gamme de fréquences variant entre 125 Hz et 1000 Hz par bandes de tiers d’octave.Définition : Les bandes de tiers d’octave sont communément utilisées en génie acoustique pour faciliter l’analyse. La fréquence supérieure de chaque bande de tiers d’octave correspond à la fréquence de la bande inférieure multipliée par la racine cubique de deux.

Modèle de tête pour étudier l’effet d’occlusion

Figure 2 (a) Tête finale reconstruite avec les structures intérieures indiquées ; (b) Canal auditif ouvert ; (c) Canal auditif occlus par un bouchon d’oreille

Comparaison entre simulations et résultats expérimentaux

La figure 3 montre les effets d’occlusion simulés correspondant aux diverses propriétés des tissus biologiques (fines lignes grises continues). Les résultats de la simulation s’accordent avec les données expérimentales obtenues sur des groupes de participants dans la littérature (ligne pointillée bleue et ligne pointillée violette). Ils mettent en évidence la variabilité de l’effet d’occlusion causée par les changements de propriétés des tissus biologiques. En d’autres termes, différentes personnes ressentent différents niveaux d’effet d’occlusion en pratique, ce qui s’explique partiellement par les différentes propriétés de leurs tissus biologiques. On peut également observer que la variabilité des résultats de simulation est inférieure à celle des données expérimentales. Cela peut s’expliquer par le fait que, lors des mesures expérimentales sur des sujets humains, la géométrie de la tête (oreille), l’emplacement du transducteur à conduction osseuse et la position où le niveau de bruit est mesuré dans le conduit auditif ne peuvent être entièrement maîtrisés. Au contraire, lors des simulations, les facteurs autres que les propriétés des tissus sont considérées comme invariables.

Simulation de l’effet d’occlusion

Figure 3 Effets d’occlusion simulés (en décibels) par bandes de tiers d’octave de divers ensembles de propriétés de tissus biologiques comparés aux données expérimentales issues des groupes de participants dans la littérature

Perspectives

Dans la suite du projet, nous avons fabriqué une tête artificielle (figure 4) à partir de la même géométrie que le modèle numérique afin de mesurer l’effet d’occlusion des bouchons d’oreille dans la pratique. Il nous faut encore travailler sur les matériaux utilisés dans la fabrication de cette tête artificielle afin d’obtenir une meilleure prédiction de l’effet d’occlusion. À long terme, notre groupe de recherche espère disposer de testeurs virtuels et physiques robustes pour évaluer l’effet d’occlusion des protections auditives.

Tête fabriquée à partir du modèle numérique

Figure 4 (a) Extérieur et (b) intérieur d’une tête artificielle fabriquée à partir de la même géométrie que le modèle numérique

Complément d’information

Pour plus d’informations concernant le modèle numérique de la tête humaine, veuillez consulter l’article suivant :

Xu, H., Sgard, F., Carillo, K., Wagnac, É., & de Guise, J. (2021). Simulation of the objective occlusion effect induced by bone-conducted stimulation using a three-dimensional finite-element model of a human head. The Journal of the Acoustical Society of America, 150(5), 4018-4030.

Pour l’évolution de l’effet d’occlusion de sa découverte à nos jours, veuillez consulter l’article suivant :

L’effet d’occlusion : quand la perception de notre voix nous dérange

À propos des auteurs
Huiyang Xu is a PhD student in the Department of System Engineering at ÉTS, focusing on studying the occlusion effect by proposing virtual and physical testers.
Franck Sgard is a Senior Researcher at IRSST and Associate Professor in the Department of Mechanical Engineering at ÉTS. His research focuses on modelling hearing protection and acoustic materials, and developing prediction and measurement tools for noise control.
Kévin Carillo is a PhD student in the Department of Mechanical Engineering at ÉTS. His research project focuses on studying the occlusion effect and aims to propose, and eventually develop, earplugs that can reduce this acoustic discomfort.
Éric Wagnac is a professor in the Department of Mechanical Engineering at ÉTS. His research interests include biomechanics, computer design, finite element simulation, protective devices and surgical tools.
Jacques de Guise is a professor in the Department of System Engineering at ÉTS and associate professor in the Department of Surgery of the Université de Montréal Faculty of Medicine. He is a researcher at the Imaging and Orthopaedics Research Laboratory at ÉTS, and at the CHUM Research Centre.