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Un modèle d'oiseau imprimé 3D pour les étudiants vétérinaires

UN MODÈLE D’OISEAU IMPRIMÉ 3D POUR LES ÉTUDIANTS VÉTÉRINAIRES

Résumé

Pour les étudiants et étudiantes vétérinaires en médecine zoologique, il est important d’apprendre comment intuber, gaver et faire des prises de sang sur les oiseaux. Malheureusement, il n’existe pas de modèles anatomiques permettant de pratiquer ces manipulations sans risques pour un oiseau vivant. Pour contourner les difficultés liées au travail avec des animaux vivants, nous avons extrait la géométrie des tissus mous et osseux du cadavre d’une buse pattue à l’aide d’un tomographe à rayons X. Les os et les tissus mous ont ensuite été numériquement reconstruits, puis séparés les uns des autres afin d’obtenir des pièces distinctes qui s’assemblent facilement après l’impression 3D. Les os ont été imprimés en utilisant le procédé de fusion laser sur lit de poudre, l’outillage et les accessoires ont été imprimés en utilisant le procédé de dépôt de fil fondu, puis les tissus mous ont été coulés en silicone. Le modèle ainsi créé a été testé par les vétérinaires spécialistes en médecine zoologique, et des étudiantes et étudiants en médicine vétérinaire. Prochainement, ce projet sera poursuivi par une étude comparative des différences d’habilités entre les ceux et celles qui auront pu s’entraîner sur le modèle anatomique avant de réaliser les procédures sur un oiseau vivant et les autres étudiants et étudiantes qui auront appris ces manipulations de manière traditionnelle.

Mots-clés : Tomographie, Modélisation organique, Fabrication additive, Ingénierie inversée

Mise en contexte

Les pratiques de prise de sang à la veine jugulaire et de gavage dans le jabot sont particulièrement courantes dans la prise en charge médicale des oiseaux. Ces techniques sont complexes à réaliser sur des oiseaux vivants en raison des risques de complications associées, notamment le risque d’hémorragie en cas de lacération de la veine jugulaire et le risque de régurgitation et d’aspiration de nourriture conduisant à une pneumonie fatale. Ce projet a pour but le développement d’un modèle anatomique de tête d’oiseau permettant la formation à ces techniques sans mettre en danger un oiseau vivant. Il a été lancé par la professeure en médecine zoologique de l’Université de Montréal Claire Grosset en collaboration avec la professeure en bio-ingénierie de l’Université McGill Natalie Reznikov et le professeur en génie mécanique de l’ÉTS Vladimir Brailovski. Ce projet est soutenu par le Centre de pédagogie universitaire de l’UdeM et le laboratoire LAMSI de l’ÉTS, et s’inscrit dans le développement du Centre de simulation et de réalité virtuelle vétérinaire, qui sera répliqué au campus délocalisé de la Faculté de médecine vétérinaire à Rimouski. Le concept global de ce centre est d’améliorer l’enseignement tout en diminuant l’utilisation d’animaux vivants dans le cursus vétérinaire.

Chaine de création du modèle de tête d’oiseau

La figure 1 est un organigramme représentant l’entièreté du procédé de conception et d’impression 3D du modèle anatomique qui doit permettre la pratique de prise de sang, de gavage et d’intubation. Les détails de la démarche sont présentés dans la suite de l’article.

Organigramme du procédé de conception et de fabrication d’un modèle d’oiseau.
Figure 1. Organigramme du procédé de conception et de fabrication d’un modèle d’oiseau.

Tomographie et reconstruction des tissus

Un système de tomographie à rayons X FF35 d’YXLON est utilisé pour acquérir une pile d’images de tissus d’oiseau qui sont rétroprojetées, alignées/enregistrées, puis converties en un modèle tridimensionnel (étape de reconstruction) et importées dans le logiciel Dragonfly (COMET Technologies Canada) pour une analyse approfondie. Pour cette étude, le cadavre congelé d’une buse pattue, un oiseau de proie qui vit dans les régions nordiques du Québec, gracieusement prêté par le conservateur du Musée Redpath de McGill, Anthony Howell, a été utilisé.

La figure 2a présente une telle image, rendue à partir de l’analyse aux rayons X, où les os et les tissus mous présentent un contraste différent, qui est utilisé pour les séparer afin de pouvoir les fabriquer à partir de différents matériaux. Puisque les tissus mous présentent une intensité variable en mode reconstruction (figure 2b), il a été décidé de les sculpter à partir d’une forme primitive en se servant de la géométrie numérisée comme référence. La figure 2c montre les tissus mous après leur reconstruction, avec la tête en vert, la langue et la trachée en jaune, le cou en rouge et le menton en bleu.

tomographie de la tête d’oiseau
Figure 2. Résultat de la tomographie de la tête d’oiseau : a) tissus mous, b) tels qu’exportés par Dragonfly, c) reconstruits.

La figure 3a montre les tissus osseux de la tête d’oiseau en 2D et 3D, la figure 3b, directement après leur importation dans le logiciel CAO Blender et la Figure 3c, après traitement logiciel et certaines modifications permettant leur fabrication. En l’occurrence, nous ajoutons un pivot à la mâchoire, remplaçons la trachée par un ressort, la colonne vertébrale par une chainette et les yeux, par des sphères.

Tissus osseux de la tête d'oiseau
Figure 3. Tissus osseux : a) représentation dans le tomographe : b) exportés par Dragonfly, b) modifiés, incluant les yeux et la mâchoire articulée.

Conception du corps du modèle et de moules de coulée

Le modèle est séparé en deux parties, corps et pied stylisé, permettant son impression sur une imprimante 3D de taille raisonnable (figure 4). Ce corps aura un jabot afin de palper le tube de gavage et une queue d’aronde afin d’attacher la tête. Même si les moules de coulée au silicone de la tête et du cou ainsi que du jabot ne sont pas illustrés ici, voici la démarche : premièrement, un positif est conçu à partir des tissus à reproduire et des pièces à insérer, puis la cavité du moule est obtenue par soustraction d’un volume plein.

Pièces conçues pour le modèle d'oiseau
Figure 4. Pièces conçues pour le modèle.

Fabrication

Maintenant que toutes les pièces sont conçues, il ne reste qu’à les fabriquer.

Impression 3D

La Figure 5 présente toutes les pièces imprimées par fusion laser sur lit de poudre (a) et par dépôt de fil fondu (b).

Pièces imprimées
Figure 5 Pièces imprimées : a) par laser sur lit de poudre (polyamide), b) par dépôt de fil fondu (ABS, PLA).

Coulée de la tête avec le cou

La Figure 6 démontre les étapes de préparation du moule de coulée au silicone et de démoulage. Premièrement, les pièces sont assemblées (a), les tubes représentant la trachée et l’œsophage sont placés et le moule est fermé. Ensuite, le moule est imperméabilisé, la résine est préparée et le moule est rempli. Après que la résine soit durcie, les tubes sont retirés, la tête est démoulée, l’excédent de silicone est enlevé et l’intérieur des joues est séparé (b). Finalement, le menton est posé (c).

Étapes de préparation du moule.
Figure 6. Coulée de la tête avec le cou : a) assemblage du moule, b) démoulage, c) pose du menton.

Assemblage du modèle

La Figure 7 montre les étapes d’assemblage du modèle. Les goupilles sont insérées dans le corps, puis les deux parties du corps (a) sont collées à l’aide de l’acétone (b). Ensuite, les goupilles du jabot sont insérées, la tête est glissée en place (c) et vissée (d) pour obtenir le modèle complet (e).

Étapes de démoulage et de post-traitement de la tête.
Figure 7. Étapes d’assemblage

Essais préliminaires

Lors du test en personne du modèle pilote, la réaction des étudiants et étudiantes en médecine vétérinaire a été très positive, malgré les imperfections. Les éléments qui restaient à perfectionner étaient l’ajout d’un jabot palpable, la capacité de fléchir le cou du modèle dorsalement et l’ajout d’un bouchon à l’extrémité de la jugulaire, permettant le prélèvement d’un plus large volume sanguin (Figure 8). Ces éléments ont été ajoutés au modèle final. La pratique de l’intubation a été jugée très réaliste, notamment la fermeture spontanée du bec de l’oiseau, laquelle est source d’appréhension pour les néophytes, qui craignent une morsure. Cette fonctionnalité permet ainsi de les préparer à une situation réelle. Il reste encore quelques tests à effectuer, mais le modèle semble prêt à les aider à exercer leurs techniques d’intubation, de gavage et de prise de sang.

Entraînement pour effectuer une prise de sang
Figure 8 Entraînement pour effectuer une prise de sang démontrée par une interne en médecine zoologique, Dre Roose

Conclusion

Ce projet collaboratif multi-universitaire a permis la réalisation d’un modèle unique en pédagogie vétérinaire. Il devrait permettre d’améliorer la confiance et l’aisance des étudiantes et étudiants vétérinaires lors de leurs premières procédures d’intubation, gavage et prise de sang jugulaire sur des oiseaux vivants à la clinique des oiseaux de proie de la Faculté de médecine vétérinaire l’Université de Montréal.

Éventuellement, plusieurs répliques de ce modèle seront envoyées au centre de simulation et de réalité virtuelle vétérinaire de Rimouski. Enfin, une étude portant sur ce modèle pédagogique testera la différence d’habilité et le niveau de confiance/appréhension entre les étudiantes et étudiants qui se seront exercés sur un modèle par rapport aux autres qui n’auront pas eu cette opportunité.

Bibliographie

Comet Technologies Canada Inc. (2021). Dragonfly (version 2021.1 Build 977) [logiciel]. Repéré à :

https://www.theobjects.com/dragonfly/index.html

Blender Foundation (2024). Blender (version 4.0.1) [logiciel]. Repéré à :

https://www.blender.org/

Onu Heino (2023). Eagle Statue [modèle 3D]. Repéré à :

https://www.printables.com/fr/model/497410-eagle-statue

Ultimaker (2024). Cura (version 5.6.0) [logiciel]. Repéré à :

https://ultimaker.com/fr/software/ultimaker-cura/

À propos des auteurs

Zacharie Simoneau est un étudiant au baccalauréat à l’ÉTS et il est intéressé par ce qui a trait à l’union de la conception et de la fabrication. Il a ainsi développé un intérêt particulier pour la fabrication additive.

Lydie-Amy Leclerc est résidente en médecine zoologique à l’Université de Montréal et travaille sur différents projets portant sur le bien-être des animaux exotiques.

Shumeng Jia est doctorante à l’Université McGill et travaille sur l’optimisation de la qualité des images tomographiques 3D à l’aide de l’IA générative.

Natalie Reznikov est professeure de bio-ingénierie à l’Université McGill et étudie les os, dents et coquillages à l’aide de la microscopie 3D.

Claire Grosset est spécialiste en médecine zoologique au Centre hospitalier universitaire vétérinaire et professeure adjointe à la Faculté de médecine vétérinaire (Université de Montréal). Elle est aussi vétérinaire de l'Aquarium du Québec. Ses domaines de recherches sont le bien être des espèces zoologiques, en particulier des ectothermes.
Vladimir Brailovski est professeur titulaire et directeur de laboratoire au Département de génie mécanique de l’ÉTS. Il est spécialiste en conception et en fabrication de dispositifs en alliages à mémoire de forme et en ingénierie des procédés pour la fabrication additive.