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Génie mécanique Recherche et innovation Les matériaux innovants et la fabrication avancée LIPEC – Laboratoire d’ingénierie des polymères et composites

Les composites polymères conducteurs

Image SEM de nanotubes de polypropylène-polystyrène-charbon. Licence CC.

Image MEB de nanotubes de polypropylène-polystyrène-charbon. Licence CC.

Les polymères sont présents dans une multitude d’objets d’usage quotidien. Ce sont des matériaux étonnants aux caractéristiques uniques ; ils sont flexibles, légers et moins chers à produire que la plupart des matériaux. Cependant, les polymères ne sont pas conducteurs d’électricité, ce qui limite parfois leur usage dans des domaines comme la robotique, les électroniques flexibles, les dispositifs médicaux intelligents et le captage d’énergie, applications où des polymères conducteurs pourraient s’avérer très utiles.

Réduire la concentration du seuil de percolation

Pour surmonter cette limitation, on ajoute aux polymères, pendant la fabrication, des nanoparticules (particules dont au moins une des dimensions est comprise entre 1 nm et 100 nm) conductrices. Les nanoparticules de ce type les plus couramment utilisées sont les nanotubes de carbone, le noir de carbone et le graphène. Pour que le matériau devienne conducteur, on doit ajouter une concentration optimale de nanoparticules au polymère. En effet, un réseau conducteur de particules doit se former au sein de la matrice polymère, comme représenté à la droite de la figure 1. Plus précisément, lorsque la conductivité électrique d’un composite polymère est mesurée en fonction de la concentration de nanoparticules, on obtient un graphique de la forme de celui de la Figure 1, en plaçant la conductivité électrique sur une échelle logarithmique. À de faibles concentrations, les particules ne se touchent pas et le matériau présente des propriétés diélectriques (non conductrices) (partie gauche de la Figure 1). Lorsque le taux de particules augmente jusqu’à une valeur critique, la conductivité augmente de plusieurs ordres de grandeur (~10 ordres de grandeur) (zone rose dans la Figure 1). Cette augmentation est spectaculaire; si la densité d’une balle de tennis augmentait des mêmes 10 ordres de grandeur, la balle pèserait autant que trois Boeing 747 à pleine charge.

La concentration de particules pour laquelle ce phénomène se produit est connue sous le nom de concentration du seuil de percolation, CSP. Au-delà de la CSP, le matériau est considéré comme conducteur. Pour des raisons économiques et afin de conserver les propriétés mécaniques souhaitées du matériau, il faut diminuer la CSP le plus possible.

Concentration du seuil de percolation de composites polymères conducteurs

Figure 1 – Schéma du principe de seuil de percolation.

Obtention d’une morphologie co-continue

Une manière innovante de réduire le seuil de percolation consiste à mélanger un polymère auquel on a ajouté des nanoparticules conductrices avec un autre polymère sans nanoparticules ajoutées. La combinaison de deux polymères ou plus est appelée un mélange et, sous des conditions de traitement précises, on obtient une morphologie co-continue, comme celle présentée à la figure 2. Cette opération se traduit par une baisse de TSP.

Morphologie co-continue de composites polymères conducteurs

Figure 2 – Morphologie co-continue obtenue en combinant deux polymères.

Or, il n’y a qu’une seule façon de retrouver ces « conditions précises de traitement » dans la création d’une morphologie co-continue de mélange en fusion. C’est d’essayer un grand nombre de paramètres comme la température, le temps et la vitesse de mélange, le couple et autres. Aussi, même si la structure illustrée à la figure 2 est obtenue, elle peut être instable lors d’un traitement ultérieur, le matériau ainsi conçu étant destiné à être moulé pour former différents objets.

Effet des déformations sur les mélanges co-continus

Ce travail nous a permis d’étudier l’évolution structurelle de mélanges conducteurs, présentant une morphologie co-continue, lorsque soumis à différentes déformations, sous différentes conditions de procédés, qui se produisent normalement pendant la fabrication des polymères. Nous avons donc eu recours à la rhéologie, l’étude de l’écoulement de la matière. Essentiellement, la rhéologie a d’abord servi à caractériser la morphologie des mélanges conducteurs co-continus, puis à soumettre le matériau à une déformation et caractériser à nouveau sa morphologie, selon la logique décrite dans la figure 3. Aussi, nous avons créé un modèle permettant de corréler la morphologie des mélanges co-continus à sa caractérisation rhéologique.

Figure 3 – Protocole expérimental

La figure 4 montre la morphologie co-continue typique d’un composite conducteur. Nous avons analysé la morphologie du mélange sous microscopie électronique à balayage (MEB) et la taille de domaine, définie par :

où est la surface totale de l’image MEB et est la longueur de l’interface entre deux polymères, estimée à l’aide d’un script maison d’analyse d’image. La taille du domaine était égale à 1,31 µm.

Image MEB de composite électroconducteur

Figure 4 – Image MEB d’un composite de nanotubes de polypropylène-polystyrène-carbone (PP/PS/MWCNT) ayant une proportion de composants de 50/50/0,5 % en poids. Le polystyrène a été extrait de la matrice afin de mieux visualiser la morphologie co-continue.

La figure 5 montre la caractérisation rhéologique du mélange dont la structure est présentée à la figure 4. Les symboles représentent les données expérimentales, tandis que la ligne continue représente le modèle créé. On peut voir qu’un bon ajustement donnant une valeur de taille de domaine de 1.5 µm a été obtenu, ce qui valide notre modèle.

Caractérisation rhéologique de mélange co-continu

Figure 5 – Module de stockage en fonction de la fréquence pour le composite PP/PS/MWCNT comprenant 0,5 % en poids de MWCNT (symboles) avec les données montrant l’ajustement du modèle créé (ligne continue).

La figure 6a montre la caractérisation rhéologique et l’ajustement du modèle du mélange dont la structure est représentée sur la figure 4, après déformation. On peut voir que le modèle créé décrit bien les données expérimentales pour le composite après la déformation appliquée. Cet ajustement du modèle a donné une valeur de taille de domaine de 5,5 µm, où la morphologie amplifiée après la déformation appliquée est clairement visible sur la Figure 6b (Image MEB du composite PP/PS/MWCNT avec 50/50/0,5 % en poids de composants après déformation).

Module de stockage de mélange co-continu

Figure 6 – a) Module de stockage en fonction de la fréquence pour le composite PP/PS/MWCNT avec 0,5 % en poids de MWCNT (symboles) avec les données montrant l’ajustement du modèle créé (ligne continue) avant et après déformation ; b) Image MEB du composite PP/PS/MWCNT avec 50/50/0,5 % en poids de composants après déformation. Le polystyrène a été extrait de la matrice pour mieux visualiser la morphologie co-continue.

Conclusion

Le modèle, ainsi que le protocole expérimental élaboré dans le cadre de notre travail (référence ci-dessous) aident à caractériser l’évolution morphologique des composites conducteurs et à prédire le comportement de ces types de matériaux lors d’une déformation appliquée. Il est ainsi possible de produire des polymères conducteurs flexibles et légers, dotés de bonnes propriétés mécaniques, à faible coût. Ces matériaux ont un avenir prometteur dans diverses applications industrielles.

Complément d’information

Pour plus de détails sur le sujet, veuillez consulter l’article suivant :

Strugova, D., É. David, and N.R. Demarquette, Linear viscoelasticity of PP/PS/MWCNT composites with co-continuous morphology. Journal of Rheology, 2022. 66(4): p. 671-681.

À propos des auteurs
Daria Strugova est doctorante au Département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur la production de nanocomposites conducteurs à base de polymères, sur l’évolution de leurs propriétés viscoélastiques linéaires et non linéaires et sur leurs propriétés morphologiques et électriques.
Éric David est professeur et chef du Département de génie mécanique de l’ÉTS. Ses recherches portent sur les matériaux diélectriques et nanodiélectriques, les machines tournantes et l’isolation des câbles souterrains.
Nicole R. Demarquette is a professor in the Mechanical Engineering Department at ÉTS. She specializes in polymeric materials and in blends of polymers and thermoplastic-based nanocomposites.