Axes de recherche
Le domaine biomédical regroupe de nombreuses technologies qui livrent une grande quantité d’informations sur le fonctionnement du système humain. La gestion intégrée de cette information se décline sous différentes formes. L’une d’elles, la fusion multimodale, consiste à tenir compte de plusieurs types d’information pour résoudre un problème de façon optimale.
L'équipe composée de Catherine Laporte, Jean-Marc Lina et Rita Noumeir propose de nouvelles méthodes d’analyse de données, tant pour aider les médecins dans leurs décisions et améliorer ainsi les soins prodigués aux patients, que pour favoriser l’émergence de découvertes scientifiques en lien avec la santé humaine grâce à des collaborations intersectorielles.
Parmi les données analysées figurent :
- Les informations EEG (électroencéphalographie) et MEG (magnétoencéphalographie) en imagerie électromagnétique du cerveau chez le patient épileptique;
- Le couplage des oscillations cérébrales observées en EEG et localisées en MEG (étude du sommeil);
- Les informations NIRS (imagerie optique diffuse) et MEG en imagerie cérébrale cognitive;
- La fusion IRM-rayons X-échographie pour le suivi et le traitement de la scoliose (acquisition non-invasive de volumes du rachis en position debout);
- Les vidéos acquises dans le visible et l’infrarouge pour l’aide à la décision aux soins intensifs pédiatriques;
- Les notes non structurées disponibles dans le dossier de santé électronique pour l’identification et l’extraction automatique des situations cliniques critiques;
- L’échographie du conduit vocal, les enregistrements vidéo du visage et les signaux acoustiques en lien avec la production de la parole pour l’étude de l’articulation;
- L’oculométrie et les données inertielles acquises en conjonction avec des images échographiques dans le but d’étudier la coordination main-œil chez les échographistes.
Les axes de recherche de chacun de nos chercheurs sont détaillés ci-dessous :
Techniques de suivi non invasif de la scoliose par l’échographie
La scoliose idiopathique adolescente est une déformation 3D complexe du rachis qui atteint 1 à 3 % de la population. Parmi les individus atteints, 1 sur 200 a une difformité dont la progression exige un traitement. Comme il n'existe actuellement aucun moyen fiable de prédire quelles déformations scoliotiques présentent un risque de progression, tous les cas suspects sont suivis à l'aide d'une série de radiographies acquises semi-annuellement au cours de la période de croissance rapide. Malheureusement, l'exposition cumulative aux rayons X augmente de façon significative l'incidence de certains cancers. En collaboration avec le Centre de recherche du CHU Sainte-Justine (Dre Marie-Claude Miron, Dr Hubert Labelle, Dr Stefan Parent et Pre Farida Cheriet), le LATIS travaille au développement de techniques de suivi non invasives de la forme de la colonne vertébrale reposant sur l'échographie 3D à main levée, un protocole d’acquisition permettant de reconstruire de grands volumes à partir d’une série d’images échographiques 2D localisées dans l’espace à l’aide d’un capteur de position placé sur la sonde, ou encore d’algorithmes de recalage d’images spécialisés. De plus, des techniques basées sur une variante robuste et globale de l’élastographie par ultrasons sont étudiées pour mieux caractériser le rôle des muscles dorsaux dans la progression de la maladie. Nos projets actuels portent sur des méthodes d’apprentissage machine permettant de guider une sonde échographique pour l’acquisition de volumes du rachis le long d’une trajectoire optimisée en fonction de la qualité du volume obtenu, ce qui aura un impact important sur l’adoption de cette technologie en milieu pratique.
Analyse de la mécanique articulatoire de la langue par l'échographie
La caractérisation de la forme et du mouvement de la langue est importante pour l’étude de la production saine et pathologique de la parole. Étant mobile, non intrusive et peu coûteuse, l’échographie s’avère très utile dans ce contexte. En collaboration avec la professeure Lucie Ménard (Département de linguistique, UQAM) et le professeur Steven Lulich (Département d’audiologie et des sciences de la parole, Université de l’Indiana à Bloomington), le LATIS travaille au développement des outils nécessaires à l’analyse de la dynamique articulatoire de la langue, notamment pour segmenter la langue en 2D et en 3D et suivre ses mouvements dans une vidéo échographique, mais aussi pour caractériser comment ces formes et mouvements diffèrent d’une population à l’autre (par exemple, chez des adultes sains comparés à de jeunes enfants). Nos projets actuels se concentrent sur l’application de ces idées à l’étude longitudinale des mouvements articulatoires à l’échelle du discours, mais aussi à l’échelle du développement du locuteur.
Interaction humain-machine en imagerie médicale
Plus que toute autre modalité d’imagerie, l’échographie dépend des connaissances et de l’expérience du praticien qui en fait l’acquisition. Celles-ci se reflètent notamment dans la qualité de l’image produite, mais aussi dans l’utilisation à profusion d’information contextuelle dans son interprétation dans la pratique clinique. Ceci suggère la pertinence d’un dialogue humain-machine dans le traitement et l’analyse des images produites par échographie. En collaboration avec le professeur Michael John McGuffin (Département de génie logiciel et des TI, ÉTS), le LATIS a achevé le développement de méthodes de segmentation d’images permettant d’extraire de manière interactive et fluide le contour d’une structure anatomique d’intérêt, un problème particulièrement difficile à cause des nombreux artéfacts qui nuisent à la qualité des images échographiques. Nous élargissons actuellement le contexte applicatif de ces interactions humain-machine à l’acquisition des images elles-mêmes, c’est-à-dire à la manipulation de la sonde par l’opérateur. Cela est plus pertinent que jamais, maintenant que le commerce offre désormais des appareils d’échographie miniaturisés de plus en plus abordables, rendant la technologie accessible à de nouveaux utilisateurs. Un système de mesure basé sur l’oculométrie, l’analyse de trajectoires et d’images est en développement afin d’étudier ensuite la coordination visuomotrice des échographistes experts. Les connaissances ainsi acquises seront mises à profit dans la conception d’outils de navigation pour faciliter l’apprentissage chez les utilisateurs novices.
Traitement du signal en électrorétinographie
L’imagerie rétinienne est essentiellement une imagerie anatomique du fond de l’oeil pour mesurer l’architecture du réseau vasculaire. En collaboration avec le Département d’ophtalmologie du Centre universitaire de santé McGill (Dr Pierre Lachapelle), nous avons entrepris depuis plus de cinq ans le développement de méthodes dédiées à la caractérisation fonctionnelle du fond de l’oeil à partir des mesures d’électrorétinographie (mesure du potentiel électrique à la surface de la cornée). Ces méthodes, qui ont été évaluées sur des modèles animaux et des bases de données cliniques longitudinales, ont un potentiel clinique indéniable. Le LATIS poursuit le développement d’outils d’analyse du potentiel électrique mesuré sur la cornée en mettant l’accent sur deux aspects : la localisation d’anomalies fonctionnelles sur la rétine et l’analyse du signal ERG de repos (analyse multifractale).
Imagerie électromagnétique de l’activité cérébrale
La mesure non invasive de l’activité bioélectrique du cerveau repose sur trois types d’approches :
- l’électroencéphalogramme (potentiel électrique sur le cuir chevelu) ou EEG, la plus répandue;
- la magnétoencéphalographie (champ magnétique à l’extérieur de la tête) ou MEG, six installations au Canada dont deux à Montréal;
- l’imagerie optique diffuse (diffusion et absorption de la lumière infrarouge) ou NIRS, la plus récente.
Nous développons des approches entropiques pour localiser l’activité corticale à partir de ces mesures externes. Ces méthodes numériques font aujourd’hui partie des techniques parmi les plus fiables pour déterminer les régions d’activation neuronales (application en épilepsie et à l’étude du sommeil dans la population vieillissante). Le LATIS est l’un des groupes les plus impliqués dans le développement de méthodes innovantes en matière d’imagerie cérébrale électromagnétique chez l’humain. L’accent est actuellement mis sur la localisation des réseaux de connectivité et la dynamique des interactions entre ces réseaux fonctionnels.
Analyse des rythmes et de l’absence de rythmes
La plupart des biomarqueurs cliniques de l’activité physiologique reposent sur la présence d’oscillations spontanées et transitoires. Le LATIS a développé une expertise dans l’analyse des rythmes, en particulier dans le contexte de l’activité électrique du cerveau mesurable, par exemple, en électroencéphalographie. Ces rythmes sont étudiés dans leur propriété de synchronisation entre différents sites, mais aussi dans leurs interactions locales. Ils sont principalement analysés dans le contexte du sommeil dans les populations normales (étude du vieillissement) et cliniques (épilepsie, Parkinson, troubles du sommeil paradoxal, etc.). Au-delà des aspects rythmiques des signaux physiologiques, le LATIS mène aussi des activités de recherche sur la composante arythmique des signaux, telle que caractérisable par l’analyse multifractale par ondelettes. Dans une perspective différente, les rythmes (en particulier la respiration) sont aussi étudiés à partir des mouvements mesurables pendant le sommeil grâce à une matrice de capteurs de pression.
Chaire de recherche sur le développement et validation de systèmes d’aide à la décision clinique à l’aide de l’intelligence artificielle
La professeure Noumeir est titulaire de la prestigieuse Chaire de recherche sur le développement et validation de systèmes informatisés d’aide à la décision clinique à l’aide de l’intelligence artificielle. Elle collabore étroitement avec le Dr Philippe Jouvet et d’autres médecins des soins intensifs du Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine afin de développer des systèmes informatiques d’aide à la décision clinique.
L’objectif est d’analyser de nombreuses données médicales en utilisant des méthodes basées sur l’intelligence artificielle, afin de mettre en place un système informatique d’aide à la décision clinique (SIADC). Un SIADC est un ensemble d’algorithmes et d’interfaces qui analysent et résument l’information afin d’aiguiller un professionnel de la santé ou un gestionnaire dans sa prise de décisions. Ce système est alimenté de différentes données médicales, lesquelles sont traitées par des algorithmes d’intelligence artificielle. Les données utilisées comprennent :
- Données cliniques : données démographiques, évaluations cliniques, diagnostics, notes d’examen physique, résultats de laboratoire, images médicales, résultats de tests spécialisés;
- Données thérapeutiques : doses et administration de médicaments, données de ventilateur, données de machine de suppléance de défaillance d’organes;
- Données organisationnelles : nombre, gravité des maladies, répartition des patients, répartition des infirmières ainsi que de leur charge de travail;
- Données d’images et de vidéos : acquisition d’images RVB, de profondeur et d’infrarouge.
Ces données sont donc massives, variées et couvrent complètement l’évolution dans le temps du patient. L’objectif est de les utiliser pour aider les soignants dans leur prise de décisions.
Dossier de santé électronique du patient
Le dossier de santé électronique connaît des investissements majeurs. Il permet d’améliorer la qualité des soins et d’augmenter l’efficacité et l’efficience du système de santé. Cependant, les défis technologiques sont énormes. Parmi les problèmes qui nous intéressent, notons la compression des images médicales dans le but d’améliorer leur archivage et leur temps de transfert sur les réseaux de télécommunication, l’extraction de structure à partir de données médicales non structurées dans le but de permettre la compréhension automatique de documents médicaux, ainsi que la modélisation des flux des patients et de l’information médicale dans le but d’améliorer les soins et de réduire les listes d’attente.
Vidéosurveillance intelligente
Nous nous intéressons à la vidéosurveillance intelligente. Plusieurs projets de recherche collaboratifs ont permis l’obtention de financement du CRSNG, du FRQS, de MITACS, de Prompt, de TransMedTech, d’IVADO et du secteur privé. Des collaborations se sont tissées avec la compagnie ASI pour la détection et la reconnaissance d’activité et avec le CHU Sainte-Justine pour l’aide au diagnostic de patients aux soins intensifs. Nous utilisons plusieurs caméras de type RGB-D (Kinect) et de type infrarouge pour effectuer et combiner des acquisitions de vidéos. Nous nous intéressons au traitement de ces vidéos, basé sur l’intelligence artificielle, pour détecter, en temps réel, certaines situations d’intérêt (par exemple, une tentative de suicide ou un cas de surdose) ou pour mesurer certains paramètres qu’il est impossible de mesurer autrement (par exemple, le niveau de conscience, la fréquence respiratoire ou le volume respiré).