Aide à la décision pour une transfusion de globules rouges

 L’objectif du programme de recherche est d’identifier à l’aide d’un apprentissage automatique (machine learning) des marqueurs cliniques et paracliniques dont pourraient se servir les cliniciens pour déterminer quels enfants traités en réanimation profiteraient d’une transfusion de globules rouges.

Contexte : On parle d’anémie lorsque la concentration sanguine d’hémoglobine d’un patient se trouve sous la limite inférieure de la norme. Une anémie grave peut contribuer au décès d’un enfant, en particulier ceux traités aux soins intensifs. Il faut traiter promptement les patients en réanimation, car le temps compte. La transfusion de globules rouges constitue la seule façon de corriger rapidement une anémie grave : cela peut sauver une vie. Cependant, il ne faut pas administrer une transfusion sans raisons valables, car toute transfusion peut causer un ou plusieurs effets nocifs parfois graves. Il faut donc réserver les transfusions aux patients pour qui les bénéfices surpassent les risques de la transfusion. 

La limite inférieure de la concentration normale d’hémoglobine est d’environ 120 g/L.
On sait déjà que les enfants traités aux soins intensifs et qui sont stabilisés sur le plan hémodynamique tolèrent une concentration d’hémoglobine aussi basse que 70 g/L. Toutefois, on ne sait toujours pas ce qu’il faut faire chez environ 88% des enfants anémiques traités aux soins intensifs, comme les patients instables sur le plan hémodynamique, les patients en état de choc, les cas de maladies cardiaques congénitales, etc. Les praticiens se doutent qu’ils devraient se servir de quelques marqueurs physiologiques indiquant que le patient souffre probablement d’une intolérance à son anémie afin de mieux cibler les enfants à transfuser. Le but du projet de recherche est d’identifier ces marqueurs, puis éventuellement d’en valider l’utilité clinique.

Méthode :  Étude épidémiologique descriptive utilisant une base de données cliniques et paracliniques enregistrées électroniquement de façon prospective.

Tous les patients admis aux soins intensifs pédiatriques (SIP) du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Sainte-Justine du 8 janvier 2013 au 30 juin 2023 seront considérés éligibles pour participer à cette étude. Critères d’exclusion : 1) patients encore prématurés (âge équivalent à < 36 semaines de gestation) ou âgés de plus de 18 ans (> 18 ans); 2) patients en mort cérébrale à l’admission; 3) patients admis comme donneur d’organes. Les patients seront catégorisés en deux strata : 1) les patients souffrant encore d’une maladie cardiaque cyanogène après une chirurgie cardiaque; 2) tous les autres patients.

Nous étudierons l’association entre une quarantaine d’indices cliniques ou paracliniques susceptibles de révéler une intolérance à une anémie et l’administration d’au moins une transfusion de globules rouges pendant le séjour aux SIP des patients recrutés dans l’étude. L’identification de ces marqueurs et la validation du modèle se feront à l’aide de méthodes issues de l’apprentissage automatique.

Résultats attendus :  Les données recueillies lors d’une enquête portant sur la pratique transfusionnelle déclarée de pédiatres réanimateurs suggèrent que l’on peut s’attendre à retenir 3 à 5 marqueurs physiologiques parmi la quarantaine de marqueurs physiologiques d’intolérance à une anémie proposée par un groupe d’experts en soins intensifs et en médecine transfusionnelle membres du regroupement Transfusion and Anemia eXpertise Initiative (groupe TAXI). 

Impact : L’étude devrait permettre de mieux cibler les patients nécessitant une transfusion de globules rouges en se servant non seulement de la concentration d’hémoglobine, mais aussi de l’information supplémentaire fournie par quelques marqueurs physiologiques. Cela permettra probablement de réduire le nombre de transfusions inutiles, de ne pas exposer certains patients aux effets adverses liés aux transfusions (non-infectious serious hazards of transfusion ou NISHOT) et de réduire la pression présentement exercée sur les producteurs qui peinent présentement à fournir suffisamment de produits sanguins, comme Héma-Québec et le Société canadienne du sang.