Communiquer à la vitesse de la lumière
Michaël Ménard, professeur en génie électrique
6 décembre 2021
Trois cent mille kilomètres à la seconde... C’est la vitesse de la lumière. Si on pouvait manipuler la lumière sur les puces aussi facilement que les informations électriques sur les circuits électroniques, la vitesse des réseaux de communication serait non seulement décuplée, mais leur portée serait quasi illimitée.
Michäel Ménard travaille sur la propagation de la lumière depuis ses études au baccalauréat, en a fait l’objet de son doctorat, et poursuit sa trajectoire scientifique. Il a déjà obtenu plusieurs brevets pour des inventions à la suite de collaboration avec des entreprises qui misent sur la technologie des photons et de la miniaturisation.
Et la lumière fut
C’est durant ses années au secondaire que le jeune Michaël découvre l’optique grâce au cours donné par Alain Saint-Pierre. Au cégep, il s’inscrit au cours d’holographie enseigné par Shaman Budhiraja. Son intérêt pour le domaine de la lumière ne faiblit pas. À l’université McGill, il entreprend ses études en génie électrique. Il rencontre Andrew G. Kirk, le professeur qui deviendra son directeur de thèse. Michaël poursuit ses recherches sur une nouvelle configuration de commutateurs optiques utilisant des filtres Fabry-Perot intégrés et accordables. Il obtient son doctorat en génie électrique en 2009.
Un stage postdoctoral à l’université Cornell aux États-Unis lui permet de travailler avec Michal Epson, une des premières chercheuses à explorer la photonique sur silicium. Cette technologie a pour but d’améliorer les performances et la densité des réseaux de télécommunications.
L’optique est dans la puce
Un des principaux défis dans l’assemblage des systèmes optiques est l’alignement extrêmement précis nécessaire au fonctionnement des nombreux composants. Cette minutie exige beaucoup de temps et d’argent. « Tandis que si on le fait sur une puce, tout est fabriqué en même temps. Donc, on réduit les coûts en faisant des circuits optiques miniaturisés. »
Michaël affine son expertise en conception et fabrication de microsystèmes photoniques comme stagiaire, puis directeur de recherche, et finalement à titre de professeur. C’est d’ailleurs à l’UQAM qu’il invente une plateforme technologique en collaboration avec le professeur Frédéric Nabki, plateforme qui est commercialisée par Æponyx, une entreprise spécialisée dans la création de circuits photoniques intégrés.
Les limites du silicium
Le silicium constitue le matériau principal dans la fabrication des circuits électroniques. Toutefois, « le silicium n’est pas très efficace pour émettre de la lumière, explique M. Ménard. Présentement, on installe un laser à côté de la puce et on les connecte ensemble. » Il s’agit de trouver une manière de faciliter l’intégration d’une source lumineuse aux puces optiques en silicium, ce qui représenterait une percée majeure, entre autres dans la technologie de la transmission des données.
Alors que de plus en plus de gens utilisent les technologies de l’information pour accomplir une variété croissante de tâches, le besoin pour des réseaux de télécommunication plus flexibles et plus puissants va en grandissant.
Allô, ici l’espace!
Plusieurs entreprises de différents pays envisagent de lancer des milliers de satellites miniatures dans l’espace afin d’étendre la capacité de leurs réseaux de communication. Comment déployer une constellation de satellites qui communiquent entre eux, voilà le prochain défi auquel aimerait s’atteler Michaël Ménard. « En ce moment, on utilise des ondes radiofréquences. Mais malheureusement, il y a une limite à la quantité d’ondes qu’on peut émettre dans l’espace. » Ménard propose de créer des liens optiques en espace libre, donc littéralement d’envoyer un faisceau laser entre les satellites pour qu’ils puissent communiquer à très grande vitesse entre eux.
D’autres projets en collaboration avec la compagnie Smith Interconnect sont aussi sur la table, notamment la création de liens optiques capables de fonctionner à haute puissance et pouvant atteindre 4000 kilomètres. « Dans l’espace, on a l’avantage de ne pas avoir d’obstacle entre les satellites, mais les distances à parcourir sont considérables. »
ÉTS et la recherche
La recherche et l’enseignement vont de pair puisque l’un nourrit l’autre. Pour Michaël Ménard, enseigner à l’ÉTS est un véritable privilège. Transposer des concepts complexes et les rendre accessibles aux futurs ingénieurs et ingénieures oblige le chercheur à se montrer créatif. Ensemble, maître et novices explorent de nouvelles idées, testent les limites de certaines théories, ou encore, vérifient les applications d’un dispositif. « On change de défi constamment. » Chose certaine, concevoir des circuits miniaturisés exige une capacité à naviguer dans l’abstrait et une intelligence logico-mathématique hors du commun.
De l’abstrait au concret
Le génie électrique bâtit un monde qui ne se voit pas, sinon à l’aide d’un microscope, qui ne se manipule pas et qui ne se sent pas au toucher. Et pourtant, ce monde invisible et intangible est en train de modifier la manière dont la planète tout entière pourra bientôt communiquer, peut-être même à partir de l’espace.
Michaël Ménard éclaire déjà la voie pour que demain la technologie optique soit aussi « ordinaire » que les composants électroniques de nos cellulaires.
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